L’Arménie, dépourvue de réserves de combustible fossile, est entièrement dépendante des importations de carburant, ce qui la rend très vulnérable économiquement et politiquement. En revanche, les ressources énergétiques renouvelables représentent une source d’énergie stable et non soumise aux aléas géopolitiques régionaux et à la volatilité des prix. Selon les spécialistes, une augmentation de 100% de l’utilisation des énergies renouvelables couvrirait les besoins en énergie du pays pendant un an en cas d’arrêt total de l’approvisionnement extérieur. Parallèlement, une politique d’économie d’énergie est indispensable. Toute consolidation de l’indépendance énergétique de l’Arménie aura des effets positifs directs sur les plans social, économique et politique.
Troisième partie
Les énergies renouvelables, un passage obligé
Une étude exhaustive du potentiel des énergies renouvelables a montré qu’à court et moyen terme, les petites centrales hydroélectriques et les chauffe-eau solaires étaient les équipements les mieux adaptés et les plus économiques pour l’Arménie. Ils sont suivis par les parcs éoliens et les pompes à chaleur. L’énergie solaire (photovoltaïque), l’énergie géothermique et l’énergie des biocarburants, notamment le bioéthanol, sont plus coûteuses mais sont appelées à jouer un rôle indispensable à long terme.
1) Depuis plusieurs années déjà, la construction de petites centrales hydroélectriques, ou leur rénovation, est en cours. On estime qu’en 2020, la capacité installée de ces centrales
augmentera jusqu’à 215 MW, contre 100 MW en 2010. Principal souci : raccorder facilement l’électricité produite au réseau électrique. Dans certains cas (terrain difficile ou éloignement), le coût d’installation de lignes électriques peut être prohibitif.
2) La capacité d’énergie éolienne de l’Arménie a été estimée à 450MW. Toutefois, la plupart des zones où sont lent des vents forts ne sont pas facilement accessibles pour les grandes turbines nécessaires aux installations d’éoliennes. Mais la situation pourrait évoluer rapidement lorsqu’on pourra fabriquer des turbines plus légères et à moindre coût.
Par conséquent, une capacité éolienne maximum de 300MW en 2020 serait une estimation réaliste. Aujourd’hui, la capacité existante est de 2,6 MW seulement dans la région de Lori.
Selon les experts, les régions les plus propices sont les cols des chaînes montagneuses ainsi que la région de Tcharentsavan. Une carte des ressources en énergie éolienne a été établie
depuis une dizaine d’années. 3) L’utilisation de l’énergie solaire (panneaux solaires photovoltaïques) pour la production d’électricité présente de nombreux avantages en termes de sécurité énergétique et d’amélioration du niveau de vie des populations, surtout dans
un contexte d’augmentation potentielle des prix de l’énergie. La valeur annuelle moyenne de l’énergie solaire en Arménie est 1 720 kWh/m², contre 1 000 kWh/m² en Europe ; par ailleurs, la durée d’ensoleillement atteint 60% en moyenne durant l’année et 85% durant les saisons chaudes. Toutes les conditions de base sont donc réunies pour développer cette source à grande échelle.
La réduction de la consommation de gaz permettrait d’obtenir de l’eau chaude et du chauffage à bas coût, et elle entraînerait des économies de 60%. Par ailleurs, le développement d’une industrie de panneaux solaires créerait de 400 à 800 emplois. Dans un premier temps, l’approche la plus rentable serait d’importer les cellules photovoltaïques et d’assembler les panneaux en Arménie. La fabrication des cellules à base de silicium commencerait dans une deuxième étape, en utilisant les dépôts de quartz qui sont abondants dans le pays. Aujourd’hui, les panneaux solaires sont de moins en moins chers et sont destinés aux populations à revenu moyen plutôt qu’aux couches aisées.
D’ailleurs, certains hôtels et restaurants utilisent partiellement l’énergie solaire ; de même, l’Université américaine en Arménie utilise des systèmes de chauffage et de climatisation
à l’énergie solaire. Actuellement, il existe un nombre limité d’installations de ce type. Selon les estimations des spécialistes, la création d’une base industrielle adéquate devrait nécessiter des investissements d’environ 300 millions de dollars.
4) L’utilisation de la biomasse. L’incinération des déchets (bois, végétaux, déchets ménagers, fumier, boues de stations d’épuration, papiers ou cartons…) produit directement de la chaleur et de l’électricité ; ces déchets peuvent être aussi transformés en biogaz, proche du gaz naturel. La biomasse représente un potentiel énergétique important en Arménie car actuellement, la production annuelle moyenne de déchets solides est estimée à 1 600 tonnes/jour. Leur stockage dans des décharges à proximité des zones urbaines et/ou leur incinération génèrent de graves problèmes environnementaux, alors que leur transformation en biogaz permettrait de produire de l’énergie électrique.
Aujourd’hui, l’usine de Lusakert, dans le nord de l’Arménie, est le seul établissement de biogaz de taille industrielle à base de déchets organiques de volaille. Par ailleurs, une centrale électrique sera construite près de la décharge de Noubarachen, aux environs d’Erévan, avec l’assistance du gouvernement japonais.
5) La production de bioéthanol peut aussi être essentielle dans le domaine des transports, puisque 100% des carburants automobiles sont importés. Selon les spécialistes, l’ajout de 5% de bioéthanol à l’essence équivaudrait à une économie annuelle d’environ 14 000 tonnes de combustible importé. Mais aujourd’hui, le prix d’obtention du bioéthanol est relativement élevé, et cette technique ne peut pas être utilisée sans une aide de l’Etat.
6) Enfin, les explorations récentes ont montré que les ressources géothermiques sont faibles et que leur exploitation et leur viabilité économique ne peuvent être que très marginales.
7) Les techniques d’économie d’énergie sont encore impopulaires en Arménie. Les bâtiments ne sont pas isolés correctement, et de nombreuses idées reçues circulent. Par exemple, « les équipements à économie d’énergie ne font aucune différence », ou « les lampes à économie d’énergie dégagent des produits chimiques toxiques quand elles éclatent ». Beaucoup
ne croient pas à l’efficacité d’un nouvel équipement et ne sont pas prêts à l’acheter. Pour remédier à cette situation, l’économie d’énergie doit devenir une « culture », et une politique adéquate doit être mise en place. Il faut commencer par l’enseigner aux enfants.
Cependant, lentement, un certain changement d’attitude semble émerger ; certaines banques tentent de contribuer à la création d’industries par l’octroi de prêts aux entreprises travaillant sur les sources d’énergie alternatives et à des personnes qui veulent acheter des équipements à économie d’énergie. L’énergie est au centre des stratégies régionales des
grandes puissances et des pays limitrophes. L’Arménie doit simultanément assurer la pérennité de ses infrastructures, résoudre les problèmes d’approvisionnement en gaz et développer des ressources alternatives pour le futur.
Pour cela, l’Etat arménien, à l’image des pays développés, devrait mettre en place des politiques de soutien efficaces au développement des énergies renouvelables, qui constituent aujourd’hui des secteurs d’activité très prometteurs. Lesquels se développeront d’autant mieux et d’autant plus vite qu’une restructuration du marché permettra de l’ouvrir à la concurrence. L’énergie solaire, la biomasse et le bioéthanol apparaissent comme des ressources assez facilement exploitables.
Cependant, le secteur énergétique est extrêmement politisé et les intérêts en jeu (internes et externes) entravent les efforts des responsables. L’indépendance énergétique de l’Arménie correspond-elle aux intérêts des grandes puissances – spécialement de la Russie ou des puissances régionales ? Une évolution favorable dans ce sens offrirait davantage de latitude à l’Arménie pour décider de son avenir.
Gérard Achdjian
APRICOT Group
Mise en relations d’affaires avec l’Arménie
www.apricotgroup.eu
Pour des informations détaillées sur l’économie de l’Arménie, veuillez
consulter le site www.gab-ibn.com